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Cancer du sein et traitement de la ménopause

Docteur Mireille Smets, Clinique St Luc – UCL

Mireille SmetsLa ménopause survient généralement entre 48 et 53 ans. Elle peut être plus précoce suite à une intervention chirurgicale (hystérectomie avec ablation des ovaires) ou suite à des traitements (chimiothérapie par exemple).

La ménopause est due à l'arrêt de fonctionnement des ovaires qui fournissent les cellules reproductrices ou ovules et produisent les hormones féminines, œstrogène et progestérone. Les œstrogènes constituent les principales hormones féminines; leur disparition peut entraîner, avec une intensité variable, des symptômes désagréables tels que bouffées de chaleur, transpiration nocturne, troubles de l'humeur, sécheresse vaginale, … A plus long terme, ce manque hormonal peut provoquer une perte progressive de masse osseuse qui aboutira, chez 30 % des femmes, à une ostéoporose; la perte de l'imprégnation en œstrogènes modifie également d'autres paramètres (cholestérol, artériosclérose, …) et expose donc la femme à un plus haut risque de maladie cardio-vasculaire.

Le principe du traitement hormonal de substitution est de prendre une association d'un œstrogène et d'un dérivé de la progestérone ou, après hystérectomie, un œstrogène seul, essentiellement dans le but de supprimer les symptômes et d'éviter la décalcification osseuse.

On sait depuis longtemps que la prise d'un traitement hormonal de substitution augmente légèrement le risque de développer un cancer du sein. Cette augmentation de risque n'existe que pendant la prise du traitement et disparaît rapidement à l'arrêt.

Il ne faut toutefois pas perdre de vue que le cancer du sein est le principal cancer de la femme: environ 10 % des femmes en seront atteintes au cours de leur vie. Le traitement hormonal de substitution augmente légèrement ce risque de base au même titre que d'autres facteurs de risque tels qu'une histoire familiale de cancer du sein, le fait de ne pas avoir eu d'enfant ou une grossesse tardive.

Les études les plus récentes ont démontré que l'augmentation de risque de cancer du sein est liée à un traitement de longue durée (plus de 5 ans); de plus, le type d'œstrogène et de progestérone ainsi que la façon de prendre le traitement (voie d'administration) joue également un rôle important. Il est donc primordial que le traitement hormonal soit bien adapté à chaque femme en particulier.

La majorité des cancers du sein sont hormono-dépendants; cela signifie que les cellules cancéreuses sont porteuses de récepteurs capables de fixer les hormones féminines, ce qui va accélérer la multiplication des cellules et donc le développement du cancer. C'est pour cette raison que lorsque l'on a été soi-même atteinte d'un cancer du sein, il est formellement interdit de prendre des hormones par voie systématique (c'est-à-dire une forme de traitement permettant la résorption des hormones et leur diffusion par la circulation sanguine dans tout l'organisme). Par contre, l'administration locale dans le vagin de certaines hormones peu puissantes est tout à fait autorisée et permet d'éviter les problèmes liés à la sécheresse vaginale et de maintenir une vie de couple harmonieuse. Malheureusement, ces traitements locaux ne sont pas efficaces sur les autres symptômes dont les bouffées de chaleur. Pour cela, il existe des médicaments non hormonaux qui agissent sur le centre cérébral responsable de la régulation thermique de l'organisme et qui sont sans danger pour les femmes ayant présenté un cancer du sein.

Suite à la diffusion dans la presse des études montrant l'association entre prise d'un traitement hormonal substitutif et risque de cancer du sein, ou parce que le traitement hormonal leur était contre-indiqué, beaucoup de femmes se sont tournées vers la phytothérapie.

Les phyto-œstrogènes sont des substances dérivées de plantes auxquelles on attribue une action similaire à celle des œstrogènes. Les phyto-œstrogènes les plus connus sont les dérivés du soja, aussi appelés Isoflavones. Il existe également des substances dérivées d'autres plantes. Ceux que l'on trouve en vente libre dans le commerce sont soit un dérivé pur (une seule sorte de phyto-œstrogène), soit un mélange en proportions variables de différents composants. Les phyto-œstrogènes ont été beaucoup moins étudiés scientifiquement que le traitement hormonal conventionnel.

Concernant les troubles vasomoteurs (bouffées de chaleur et transpiration), ces substances ne sont guère plus efficaces qu'un simple placebo. Elles peuvent être utiles pour éviter la sécheresse vaginale mais n'ont actuellement pas d'efficacité démontrée pour la prévention de l'ostéoporose. Certains phyto-œstrogènes semblent inoffensifs pour le risque de cancer du sein mais ce n'est pas le cas pour tous d'après les études réalisées en laboratoire. Il faut également veiller à ce qu'un traitement de confort ne diminue pas l'efficacité du traitement médicamenteux (traitement anti-hormonal tel que le tamoxifène) souvent prescrit en complément à la chirurgie du cancer du sein. Comme pour tout autre traitement, il est donc judicieux de discuter avec son médecin traitant avant de prendre des phyto-œstrogènes.

 

(Action Sein 2006)